Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le quart net de ma moitié
Le quart net de ma moitié
  • Isoler des mots, les transcrire, découvrir le sens au fur et à mesure de l'écriture, c'est un peu quitter le bateau avant qu'il ne prenne l'eau, c'est jouer avec des bouts de phrases. Libre propos au quotidien, parfois pertinent et souvent impertinent .
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Le quart net de ma moitié
Visiteurs
Depuis la création 76 768
Albums Photos
Pages
9 décembre 2014

Enfer et paradis tsigane

200099_1002106307508_5982_n

Enfer

Octobre 1991: reportage sur les Tsiganes. J’avais juste pris quelques contacts avec deux ou trois périodiques qui semblaient intéressés par le sujet. A dire vrai,  je m’y rendais, simplement attiré par un peuple diabolisé et dont je ne connaissais que «l’exécrable réputation» de brigands, voleurs, criminels, sécuristes …

J’avais aussi mes préjugés à l’égard de ce peuple sur lequel semble peser une malédiction et un déracinement perpétuels. J’avais souvent en tête des visions furtives de précédents voyages,  faites de couleurs chatoyantes; celles des jupes bariolées de ces femmes sveltes et fières aux regards ensorcelants. Et puis, j’aimais aussi cette musique qui touche directement l’âme et les tripes et dont je ne connaissais que quelques variations.

Je me rendis avec l’équipe MSF Belgique et, au départ de Cluj, à la périphérie de Jibau (département de Salaj), là où se trouvent «parqués» une communauté Rrom. Vaste étendue de bidonvilles. En ce début d’automne pluvieux, la strada principale et les artères latérales sont boueuses à l’extrême. Difficile pour Geza Otves, le logisticien tsigane, et moi de nous frayer un passage dans ce véritable cloaque!

Nous parvenons, après avoir parlementé avec le chef du village, à visiter quelques baraquements,  tous des ruines dont les toits sont rafistolés à l’aide de bâches en plastique. Ces demeures, à vrai dire, se limitent bien souvent à une seule pièce d'environ 16 m2 où chaque famille s’entasse à six, huit voire dix personnes! Et dans ces taudis, partout, des postes de télévision pour adoucir les rigueurs du quotidien. Car s’ils n’ont pas d’eau courante, ils ont l’électricité!

La désolation est générale. En quelques instants, une marmaille de plus en plus grouillante s’agglutine autour de nous! Des dizaines et des dizaines d’enfants convergent en quête de je ne sais quoi!  Et malgré l’émotion, la honte de ne pouvoir rien faire, je prends note à la hâte des commentaires du boulibash ainsi que de quelques humiliants clichés. «Nous préférons vivre dans cette misère et conserver notre mode de vie plutôt que de nous retrouver dans des blocs où nous perdrions notre âme!» expliqua-t-il. Très vite, la curiosité de l’assistance – je n’avais rien à leur offrir – s’est muée  en hostilité croissante et Geza me conseilla d’arrêter là les questions et de repartir aussitôt…

Paradis

Avril 1992: mon groupe de rock est en tournée pour soutenir Allianca Civica (l’association culturelle, non le parti politique monarchiste). Après deux concerts à Timişoara devant une foule clairsemée – la promotion n’avait pas été réalisée – nous sommes attendus ce soir-là à l’université de Craiova pour un concert organisé, cette fois, par l’association des étudiants.

Mais quelque part, entre Turnu Severin et Craiova, notre attention est attirée par une fête autour d’un feu de bois, qui se déroule dans ce qui ressemble à un campement. Des danses endiablées et lascives se succèdent et s’intensifient dans une atmosphère surchauffée à l’extrême. L’alcool de prune passe de main en main et les bouteilles se vident comme de l’apa minerala.

Et les rockers que nous étions, de se voir entraînés dans une farandole frénétique. Et le violon, l’accordéon, le cymbalum de nous inciter à sortir nos guitares. Nous étions venus pour quelques instants, mais l’allégresse fantastique de ces Rroms de nous retenir encore et encore…. Les improvisations se succédant sans relâche jusque tard dans la nuit! Nous sommes finalement partis, passablement imbibés, formidablement heureux. Nous avions ri, bu, mangé, joué de la musique, dansé, fraternisé! Le concert de Craiova, reporté au lendemain par la force des choses, fut  lui aussi mémorable! 

                          

    

Carnet d'errance 1999.

 

Publicité
Publicité
Commentaires
S
Inoubliable, les moments autour d'un feu de bois...<br /> <br /> <br /> <br /> Un beau texte sur les tsiganes.
Répondre
Publicité